Institutions politiques 16 et 17/01/08

TITRE INTRODUCTIF A LA 5ème REPUBLIQUE

 

 


La 5ème république n’est qu’une façon de réagir à une forme de séparation des pouvoirs qui avait échoué lors des précédentes républiques (3ème et 4ème). Le titre introductif est aussi l’occasion d’expliquer la loi constitutionnelle du 3 juin 1958.

 

Chapitre 1 : La séparation des pouvoirs

 

Nous nous intéressons ici à la séparation des pouvoirs telle qu’elle est apparue en Europe et telle qu’elle s’applique dans les démocraties d’Europe et en France particulièrement. Nous verrons comment elle a été théorisée et comment elle a été appliquée.

 

1. L’émergence et théorisation de la séparation des pouvoirs

 

1.1. L’émergence de la séparation des pouvoirs en Angleterre

 

C’est en Angleterre que prend forme la séparation des pouvoirs, au cours d’une période relativement longue. La monarchie anglaise telle qu’elle est installée au 11ème siècle est, contrairement au schéma qu’ont connu les autres Etats européens, une monarchie absolue (sur le continent la féodalité mettra longtemps à disparaître). On parle de monarchie absolue parce que le roi d’Angleterre gouverne seul, et non parce qu’il a des pouvoirs liberticides. Le roi a gouverné seul mais il consultait de temps en temps sa noblesse, lorsqu’il exerçait le pouvoir législatif et lorsqu’il rendait la justice (pour les grands procès, ce n’était pas automatique). La noblesse formait un grand conseil, le « magnum concilium » (qui deviendra plus tard la chambre des Lords). Ce grand conseil n’a qu’un rôle consultatif : le roi n’est pas lié par les avis qu’il formule. Ce conseil va cependant se renforcer dès le début du 13ème siècle, suite à une révolte des barons, qui obligera le roi à souscrire, à concéder à sa noblesse la Magna Carta en 1215. Cette grande charte affirme pose le principe du consentement du grand conseil à la levée de l’impôt. A partir de là on peut considérer que le grand conseil est le détenteur du pouvoir financier, pouvoir considérable puisque le roi ne peut rien faire sans que sa noblesse accorde la levée d’impôt (il faut cependant préciser que les rois n’ont pas toujours respecté ce pouvoir du grand conseil, même si globalement il l’a été). Le grand conseil va user de ce pouvoir financier pour augmenter ses prérogatives. Il va prendre en effet l’habitude de faire des propositions au roi en matière législative, sous forme de pétitions. Il ne s’agit que de demandes, et pendant très longtemps le roi n’était pas tenu d’y donner suite, mais rapidement ces pétitions vont prendre la forme de textes de loi que finalement le roi n’aura plus qu’à signer. Cette transformation a pu avoir lieu par l’usage du pouvoir financier et la contre-partie qu’il implique : le roi devait avoir conscience qu’en donnant suite aux demandes de sa noblesse elle lui accorderait plus facilement le vote de crédits (c’est une sorte de chantage à l’impôt). C’est ainsi que le grand conseil acquiert l’initiative des lois.

 

A partir de la fin du 13ème siècle le roi va prendre l’habitude de consulter les représentants des bourgs et des comtés pour contre-balancer l’influence de sa noblesse. Ces représentants sont constituer une autre assemblée, que l’on va appeler le common concilium (conseil commun), ancêtre direct de la chambre des communes. Cette assemblée sera associée au travail législatif de la même façon que le grand conseil, et au 15ème siècle il est communément admis que l’adoption de la loi requiert e consentement à la fois du roi, du grand conseil, et du conseil commun. Tous ont un pouvoir d’initiative, et tous peuvent donc s’opposer à la loi.

 

L’évolution conduira cet embryon de Parlement à s’arroger la totalité du pouvoir législatif et à déposséder en conséquence le monarque. Il y a un moment clé dans cette révolution : l’accession au trône du premier de la dynastie des Stuart, en 1603. Les Stuart, au cours du 17ème siècle, vont provoquer deux révolutions, ce sont les deux révolutions d’Angleterre. Ces révolutions s’expliquent par la tentative du roi de nier le pouvoir législatif des chambres, et également par des exactions financières. Les Stuart vont en effet essayer de retirer aux chambres une partie du pouvoir législatif. La première révolution qui a lieu en 1640 s’achève par la décapitation du roi Charles 1er. Une république sera mise en place et dirigée par Cromwell. A la mort de Cromwell en 1660 la dynastie des Stuart est rétablie dans ses droits. La seconde révolution se produit en 1688 et elle se conclut quant à elle par la victoire du parlement sur l’autorité du roi (victoire définitive). Le roi est contraint d’abdiquer, il est chassé du trône d’Angleterre (c’est Jacques II), et son successeur n’accède au trône qu’à la condition qu’il souscrive au Bill of Right (1689). Le Bill of Right réaffirme l’ensemble des pouvoirs des chambres, et notamment le pouvoir financier des chambres. Il rétablit le Parlement dans l’intégralité de ses prérogatives.

 

La possibilité du roi de s’opposer à la loi, par la suite, va disparaître, en raison de son inapplication : la dernière fois qu’un roi s’oppose à une loi votée par le Parlement c’est 1707. Plus aucun monarque n’osera faire usage de ce droit, et il va donc tomber en désuétude, et on considèrera qu’il a été abrogé. On peu considérer qu’à la fin du 17ème siècle la séparation des pouvoirs, en Angleterre, est à peu près réalisée. Le monarque est réduit à ses fonctions, à ses prérogatives exécutives (exécution de la loi).

 

Au 19ème siècle, puis surtout au 20ème ; le roi va perdre l’ensemble de ses pouvoirs au bénéfice du cabinet, c’est à dire du gouvernement, et donc au bénéfice du premier ministre, tandis que la chambre des Lords, représentant la noblesse, va perdre la majeure partie de son pouvoir législatif. Aujourd’hui cette chambre demeure mais elle ne peut plus s’opposer à la loi, de même que le gouvernement et le premier ministre ne sont plus responsables devant la chambre des Lords. 

 

1.2. La théorisation par Montesquieu

 

Il serait réducteur d’assimiler la séparation des pouvoirs et Montesquieu. La séparation des pouvoirs figure en effet d’une certaine manière dans les écrits d’Aristote (philosophe du 4ème siècle avant J.-C.). Locke, qui s’est lui même inspiré d’Aristote, va aussi exposer une forme de séparation des pouvoirs (1690 : Second traité sur le gouvernement civil). Locke va être l’un des premiers à distinguer les trois fonctions essentielles de l’Etat (puissance législative, la puissance exécutive et la puissance de juger).

 

Cependant il est vrai que c’est le français Montesquieu qui va donner à la séparation des pouvoirs une conception achevée. On peut considérer que c’est lui qui théorise la séparation des pouvoirs telle qu’on la connaît aujourd’hui (1748 : L’esprit des lois). En somme il y a des esquisses dans des ouvrages d’auteurs qui sont antérieurs, mais la théorie globale, l’explication théorique de l’ensemble, n’a été rédigé que par Montesquieu.

 

Montesquieu écrit alors que la France est encore dans un régime de monarchie absolue (contrairement à Locke). Montesquieu rappelle que le pouvoir est, par essence, un danger pour les libertés, particulièrement quand il est concentré entre les mains d’une même personne ou d’un même organe : « Le pouvoir absolu corrompt », « il est une expérience éternelle que tout homme qui a du pouvoir est tenté d’en abuser… ». Selon Montesquieu il faut donc parvenir à limiter le pouvoir : « il faut que par la disposition des choses le pouvoir arrête le pouvoir ». Montesquieu constate l’existence de trois pouvoirs, plus exactement trois fonctions essentielles du pouvoir, qui peuvent être toutes concentrées : la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit des gens (pouvoir diplomatique et pouvoir militaire), la puissance exécutrice des choses qui dépendent du droit civil (la fonction de juger les différents entre particuliers, et de réprimer les infractions), et enfin la puissance législative, qui est la plus importante. Ce qui nous apparaît aujourd’hui comme des évidences ne l’était pas nécessairement.

 

A partir de ce constat Montesquieu explique que ces différentes fonctions doivent être confiées à des organes distincts de sorte que ces organes s’opposent les uns aux autres et finalement de sorte que l’on aboutisse à une limitation du pouvoir. C’est ce qu’on appelle une séparation organique des pouvoirs. Si l’on regarde d’un peu plus près les choses se passent de la manière suivante : la puissance de juger est évacuée, parce qu’elle n’est pas très dangereuse (« la fonction de juger est pour ainsi dire nulle ») ; ensuite la puissance législative, la plus dangereuse pour les libertés, doit être affaiblie, en créant deux chambres, l’une représentant la noblesse, l’autre représentant « le peuple ». De cette division naîtra une opposition puisque les chambres ont des intérêts distincts, parce qu’elles ne représentent pas les mêmes classes sociales, et vont donc être naturellement amenées à s’opposer. Enfin la fonction exécutrice sera confiée à une personne seule, le monarque : elle a besoin d’immédiateté, d’efficacité. Ce sont finalement les trois classes sociales qui constituent la société française qui sont représentées dans ce schéma institutionnel.

 

Si les trois pouvoirs sont organiquement séparés, ils disposent d’une faculté mutuelle d’empêchement. L’expression est importante, elle est différente de la fonction d’action réciproque. En particulier Montesquieu considère que le pouvoir exécutif doit pouvoir s’opposer au pouvoir législatif est donc arrêter la loi, empêcher la loi. Il reconnaît dans sa théorie un droit de veto, un droit de veto royal que le roi va pouvoir imposer au gouvernement. L’idée générale est de parvenir à un certain équilibre des pouvoirs. Il y a d’ailleurs une crainte du blocage des pouvoirs les uns vis à vis des autres : on peut craindre que ce système conduise à l’immobilisme. Puisqu’elles sont liées, contraintes l’une vis à vis des autres, Montesquieu pensent qu’elles parviendront à s’entendre (« elles seront contraintes d’aller de concert »).

 

La révolution va consacrer le principe même : c’est l’article 16 qui évoque le principe de la séparation des pouvoirs comme élément essentiel de la constitution. Ces démocraties occidentales ne vont pas cependant toutes s’organiser de la même manière. Il y a encore aujourd’hui deux manières principales de mettre en œuvre cette séparation des pouvoirs.

 

2. Les interprétations classiques de la séparation des pouvoirs

 

Il existe une première application qui est une interprétation souple de la séparation des pouvoirs : c’est ce qu’on appelle le régime parlementaire. Il existe un autre modèle qui est une forme dite rigide ou stricte des pouvoirs : il caractérise le régime présidentiel.

 

2.1. Le régime présidentiel ou la séparation rigide des pouvoirs

 

Ce régime trouve une mise en œuvre aux Etats-Unis, pays qui est souvent présenté comme le seul Etat ayant aujourd’hui une séparation rigide des pouvoirs. Cette séparation rigide des pouvoirs renvoie à trois choses :

-         Il y a d’abord une indépendance organique des pouvoirs, c’est à dire qu’aucun des pouvoirs ne tient sa désignation de l’autre. Encore plus concrètement le parlement aux Etats-Unis est élu au suffrage universel direct (pour les deux chambres), et le président de la république est lui aussi désigné indirectement par les électeurs (il ne tient pas sa nomination du Parlement).Il n’existe pas de moyen d’action réciproque, c’est à dire qu’aucun des pouvoirs ne peut renverser l’autre : on en conclut qu’il n’existe pas de droit de dissolution de l’exécutif à l’égard d’une ou des chambres du Parlement, et qu’il n’existe pas de responsabilité du président devant le Parlement. Il y a donc une réelle indépendance des pouvoirs.

-         Il y a dans ce système une grande spécialisation des fonctions. Le président des Etats-Unis exerce le pouvoir exécutif, et de son côté le Parlement exerce seul le pouvoir législatif (un président des Etats-Unis n’a aucun moyen institutionnel, juridique, pour intervenir dans l’adoption des lois).

-         Il existe toutefois une certaine interdépendance des pouvoirs : exécutif et législatif disposent en effet de facultés mutuelles d’empêchement, assez proches d’ailleurs de ce qu’a imaginé Montesquieu. Le législatif peut empêcher l’exécutif dans la mesure où c’est lui qui vote la loi et le budget (sans budget l’exécutif ne peut rien faire, ni sans lois…). L’exécutif quant à lui dispose d’un droit de veto sur la loi, qui n’est que suspensif (le président américain peut arrêter une loi mais les assemblées peuvent surmonter le veto par un vote à la majorité des deux tiers de chacune d’elles). Il y a là véritablement un système de poids et de contre-poids (checks and balances), qui tend à établir un certain équilibre entre les pouvoirs.

 

Ce système d’équilibre des pouvoirs est relativement difficile à établir, et il ne fonctionne véritablement correctement qu’aux Etats-Unis. Ce n’est pas un hasard : le système américain ne conduit pas à des blocages parce qu’il n’y a pas de fracture idéologique entre les deux partis qui domine la vie politique (républicains et démocrates ont des divergences mais ils sont d’accord sur les points principaux, sur les fondements), et il n’existe pas de discipline partisane de la part des parlementaires comme cela peut exister en France ou au Royaume-Uni (les partis votent l’un contre l’autre). C’est une donnée fondamentale : un président des Etats-Unis qui a face à lui un Parlement du parti opposé peut cependant appliquer sa politique. C’est une forme, ou un mode de gouvernement qui n’est pas totalement étranger au modèle français : la constitution de 1791 mettait en œuvre une séparation relativement rigide des pouvoirs. On a réessayé en 1848, mais la constitution a eu une durée de vie très brève. Ce qu’on peut déduire de cette expérience là est que la séparation rigide des pouvoirs n’a pas fonctionné en France.

 

2.2. La séparation souple des pouvoirs : le régime parlementaire

 

Cette interprétation de la séparation des pouvoirs est née en Angleterre au 18ème siècle. C’est un régime qui, au fond, se définit par la collaboration des pouvoirs.

 

2.2.1. Son émergence en Angleterre au 18ème siècle

 

Au début du 18ème siècle, c’est un prince allemand qui accède au trône d’Angleterre (Georges Ier). Ce prince et sa descendance ne vont pas s’intéresser beaucoup aux affaires d’Angleterre, et c’est ce désintérêt même qui va engendrer des évolutions importantes pour le système politique anglais. Ces évolutions sont les suivantes :

-         L’apparition de la fonction de premier ministre. Les rois de la dynastie des Hanovre (Georges), vont prendre l’habitude de ne pas participer aux réunions du cabinet (le mot historiquement premier qui désigne le gouvernement), lieu de décision des affaires d’Angleterre. De manière tout à fait naturelle c’est un des ministres qui va alors faire l’intermédiaire entre le roi et le cabinet. Cet intermédiaire va faire connaître au cabinet les choix du monarque et réciproquement. Il va acquérir de cette manière une influence considérable, un rôle de première envergure. C’est celui qui par la suite prendra le titre de premier ministre. Le premier qui a exercé cette fonction est Walpole, entre 1721 et 1742 (il ne porte pas encore le titre de premier ministre mais en a la fonction).

-         L’apparition de la responsabilité politique des ministres devant le Parlement. Les ministres étaient choisis par le monarque, et ils étaient révocables uniquement par le monarque. Il n’était donc responsable, politiquement, que devant le roi. Cela étant il existait dans le droit anglais une procédure qui permettait au Parlement de mettre en cause la responsabilité pénale des ministres : c’est la procédure de l’impeachment. La chambre des communes pouvait en prendre l’initiative et le ministre était jugé par la chambre des Lords. Cependant ce n’est qu’une procédure de mise en jeu de la responsabilité pénale (on ne pouvait reprocher aux ministres que des infractions pénales). Seulement cette procédure d’impeachment (qui existe aux Etats-Unis pour mettre en jeu la responsabilité pénale du président) peut être lourde de conséquences : l’issue de cette procédure pouvait être la décapitation. En 1742 la chambre des communes va enclencher une telle procédure contre Walpole, et cette fois sur des fondements politiques : la procédure n’est pas utilisée comme elle avait été prévue. Walpole sait alors qu’il risque, au terme de la procédure, la décapitation : il décide alors de démissionner plutôt que d’attendre le jugement. C’est comme cela qu’est née la responsabilité politique des ministres devant le Parlement. Cette affaire a constitué un précédent, qui s’est reproduit, et la responsabilité pénale des ministres s’est transformée en responsabilité politique.

-         La naissance de ce qu’on appelle la solidarité gouvernementale. La responsabilité politique des ministres n’était qu’individuelle (le fait qu’un des ministres soit éjecté n’impliquait pas le départ collectif du gouvernement). C’est la responsabilité collégiale des ministres, des membres du gouvernement, qui va naître avec la démission en 1782 du premier ministres Lord Norph. Cette démission a entraîné le départ collectif des membres du gouvernement (c’était une décision de leur part). Nous avons donc là à nouveau un précédent qui va se renouveler : lorsqu’un des ministres sera mis en cause, c’est l’ensemble des ministres qui seront concernés, et démissionneront en conséquence. En contrepartie les décisions se prendront dorénavant collégialement. On peut considérer qu’à partir de là le gouvernement est devenu un organe collégial.

 

Le régime parlementaire est en place, il se caractérise par la responsabilité collégiale du gouvernement devant le Parlement. La contrepartie de cette responsabilité est que l’exécutif dispose d’un droit de dissolution : c’est un instrument qui est essentiel à l’équilibre des pouvoirs, puisqu’il ne faut pas que le Parlement puisse trop facilement renverser le gouvernement, pour éviter l’instabilité ministérielle.

 

                   2.2.2. Un régime de collaboration des pouvoirs

 

Cette collaboration étroite résulte de deux choses : d’une interdépendance organique, de l’existence de moyens d’action réciproque (la formation du gouvernement va dépendre de la couleur politique du Parlement, il y a spontanément une concordance) ; d’une grande interdépendance fonctionnelle : l’initiative des lois est généralement partagée, le gouvernement peut intervenir tout au long de la procédure d’adoption de la loi (selon les différents systèmes il interviendra de manière plus ou moins prépondérante).

 

Cela étant dit, on constate souvent en pratique que le régime parlementaire ne réussit pas à établir l’équilibre entre exécutif et législatif, et au fond il ne parvient pas à limiter le pouvoir. Ce que l’on constate c’est que tantôt c’est le législatif qui domine totalement (c’est vrai pour les 3ème et 4ème républiques en France), tantôt c’est l’exécutif (exemple de la 5ème république). Le cas de la France est de ce point de vue tout à fait illustrant, puisqu’on constate toujours un déséquilibre.

 

3. Troisième et quatrième république : le parlementarisme à la française

 

Le point à retenir est l’instabilité gouvernementale : lorsqu’on parle de parlementarisme à la française on évoque l’instabilité ministérielle et la toute puissance du Parlement. C’est en soi un dysfonctionnement du régime parlementaire.

 

3.1. La troisième république

 

Elle est née d’une défaite militaire (des armées françaises à Sedan en 1870), et elle disparaît avec la débâcle en 1940. La durée de vie moyenne d’un gouvernement sous cette 3ème république est de 8 mois.

 


3.1.1. Une situation transitoire (1870-1875)

 

Après la défaite, la république est proclamée (le 4 septembre) par le gouvernement provisoire : le second empire s’est effondré. Pendant presque 4 ans, la France va connaître une période de transition, unique, qui se caractérise par l’absence de constitution. Les élections de février 1871 manifestent une majorité monarchiste, et on pouvait donc s’attendre au rétablissement de la monarchie. Mais la restauration monarchique n’est pas possible parce que le prétendant légitime au trône, qui est le comte de Chambord, refuse absolument le drapeau tricolore.

 

[…] voir cours d’HPES 1er semestre

 

Le 20 novembre 1873, la loi du septennat est adoptée. Cette loi ne fait que consolider le provisoire : on attend que le comte de Chambord décède.

 

Mais le vide constitutionnel n’est pas durablement tenable. En 1875 voient le jour trois lois constitutionnelles… Mais on est convaincu que cette constitution n’est pas faite pour durer, ce qui permet de comprendre pourquoi elle est si brève et qu’elle ne contient pas de référence aux droits de l’homme… Cette constitution, destinée à n’être que provisoire, va durer 65 ans.

 

                        3.1.2. L’instabilité gouvernementale

 

Ce qui est singulier dans la troisième république, c’est que le gouvernement est responsable devant les deux chambres du Parlement (c’est un cas unique dans l’histoire constitutionnelle, très généralement le gouvernement n’est responsable que devant la chambre basse, élue au suffrage universel direct). Le Sénat, en pratique, sera la cause de 8 renversements ministériels, alors même qu’il n’est pas soumis au droit de dissolution.

 

                                   3.1.2.1. La crise de mai 1877

 

La crise en elle-même commence par le renvoi de Jules Simon, alors président du conseil (premier ministre en somme), par le maréchal de Mac Mahon, président de la république, le 16 mai 1877. Ce renvoi a une signification politique claire : le président de la république considère que le président du conseil n’est pas seulement responsable devant les chambres mais également devant le président de la république, c’est là l’interprétation de cet épisode de mai 1877. Les républicains sont majoritaires à la chambre des députés depuis mars 1876, et ces républicains vont s’élever, vont protester par un manifeste signé par 363 députés : ils s’insurgent, s’indignent devant le non respect des règles constitutionnelles. Mac Mahon ne s’en laisse pas compter, il va dissoudre l’assemblée le 25 juin 1876. Un bras de fer s’est engagé : des élections sont organisées et octobre, et renvoient à la chambre une majorité républicaine. C’est un désaveu populaire. Mac Mahon, dans un premier temps, n’en tire par les conséquences, et tente d’une certaine manière d’ignorer le vote populaire en faisant appel à Rochebouet pour présider le conseil des ministres. La chambre indique immédiatement qu’elle n’entrera pas e contact avec ce gouvernement, qu’elle n’adoptera ni ses budgets ni ses lois. On est au cœur de ce bras de fer. Mac Mahon finit par se soumettre en remplaçant Rochebouet par un président du conseil qui a le soutien des républicains : Jules Armant Dufaure.

 

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