Histoire des institutions 4/03/08

L'autre formation mise en place par cette réforme de Louis XIV concerne le conseil des finances. C'est dans le cadre de ce conseil des finances que les affaires financières de tout le royaume se décident. Le personnage central de cette institution est le contrôleur général des finances. C'est le conseil des finances qui détermine le montant de la taille (brevet de taille). C'est aussi ce conseil des finances qui gère les contentieux financiers, ce qui représente une activité importante de ce conseil.

 

La dernière composante de cette réorganisation concerne le conseil privé ou conseil des partis. Il ne s'agit pas à proprement parler d'un conseil de gouvernement mais plutôt d'un organe juridictionnel destiné à exercer la justice retenue par le roi.

 

C'est cette organisation, mise en place de façon progressive à la fin du 17ème siècle, qui va continuer à fonctionner tout au long du 18ème, si l'on excepte la période de la régence (à partir de 1715) où le duc d'Orléans met en place un système de gouvernement par conseils, conseils aux mains de la grande noblesse du royaume. C'est une expérience qui tourne court puisque très rapidement on retrouve des réflexes absolutistes et le duc d'Orléans lui-même applique le conseil du roi dans sa version mise en place par Louis XIV.

 

Ce que l'on peut noter pour le 18ème siècle, c'est que ces conseils, même s'ils restent en place, vont décliner au profit des ministres et secrétaires d'Etat, qui jouent donc un rôle de plus en plus important dans l'administration du royaume. Cette dégradation, ce déclin des conseils, s'explique principalement par l'attitude des souverains. En effet Louis XV, comme Louis XVI, sont beaucoup moins assidus que Louis XIV pour gérer les affaires du royaume. On assiste donc à un glissement du pouvoir exécutif : du conseil du roi vers les ministres et secrétaires d'Etat.

 

II. Les ministres et les secrétaires d'Etat

 

Ces ministres, sous l'Ancien Régime, sont au nombre de 6. 2 sont à distinguer parce qu'ils jouent un rôle très important : le premier d'entre eux est le chancelier.

 

Le chancelier est un des plus hauts dignitaires du royaume, ce qui s'explique par sa fonction : en effet le chancelier dispose de ce que l'on appelle le pouvoir de plume, c'est à dire la faculté pour le chancelier d'écrire au nom du roi. Il est le porteur de la parole du souverain. A ce titre il dispose également de l'instrument qui permet d'authentifier la parole du roi : il est le garde des sceaux. Par cette fonction, par ce que représente cette fonction, le garde des sceaux est inamovible, parce qu'il incarne physiquement, auprès du souverain, la permanence de la couronne. Le chancelier, en écrivant le droit au nom du roi, exerce également un véritable contrôle de constitutionnalité : il va contrôler effectivement que la loi du roi s'inscrit dans le respect des lois fondamentales, dans le respect des privilèges et des coutumes. Ce chancelier est également le secrétaire du gouvernement central. C'est sur lui que repose le fonctionnement matériel de ce gouvernement central. Au 17ème siècle, le chancelier apparaît véritablement comme l'homme fort du gouvernement monarchique.

 

Le deuxième ministre à jouer un rôle fondamental est le contrôleur général des finances. Ce contrôleur général des finances devient le personnage clé, le personnafe le plus important du gouvernement après la mort de Louis XIV. Il est l'équivalent d'un premier ministre tel qu'on peut le connaître dans le gouvernement actuel. C'est lui qui gère les finances de la monarchie, et qui à ce titre va orienter le gouvernement. Ce ministre est assisté d'intendants de finance. Ces intendants de finance se déclinent en fonction de leurs attributions de la manière suivante : on retrouve un intendant de commerce, un directeur du trésor, et enfin, à partir du milieu du 18ème siècle, un directeur général des ponts et chaussées. A travers ce personnel technique qui l'entoure, on a une idée des missions qui sont celles de ce contrôleur général des finances : il est véritablement à l'origine de ce que l'on appelle aujourd'hui l'interventionnisme de l'Etat, interventionnisme qui se traduit notamment par la mise en place d'une politique d'infrastructures pour le royaume.

 

A côté de ces deux ministres principaux on retrouve 4 secrétaires d'Etat. Chacun de ces quatre secrétaires d'Etat se retrouve à la tête d'un véritable département ministériel : on retrouve un secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, un secrétaire d'Etat à la marine et aux colonies, un autre à la guerre, et un dernier qui a la charge de la maison du roi.

 

En plus de ces départements ministériels, chacun de ces secrétaires se voit attribuer l'administration et le contrôle d'une partie du royaume. Concrètement le royaume est divisé en quatre parts à peu près équivalentes, et chacun des secrétaires va gérer son quart du territoire.

 

Section 2 : L'administration provinciale

 

On retrouve cette administration dans chacune des provinces, puisque le pouvoir royal contrôle et administre, par l'intermédiaire de ses agents pour la période moderne, l'ensemble du territoire monarchique.

 

I. Les gouverneurs

 

Ces gouverneurs constituent la première tentative du pouvoir royal pour créer une institution ayant la confiance totale du souverain. Ces agents, le roi va les choisir parmi la grande noblesse qui l'entoure. Cette grande noblesse qui assiste le roi en allant visiter les provinces prend le nom de lieutenant général. De mission temporaire, cette mission des agents du roi va devenir permanente. La fonction va se stabiliser, et le lieutenant général devient gouverneur.

 

La circonscription du gouverneur est le gouvernement, autre nom de la province. Le souverain se rend compte rapidement que les compétences des gouverneurs peuvent représenter un danger pour l'unité du royaume et de la souveraineté : un danger puisque ces gouverneurs disposent, dans leur province, leur gouvernement, des pleins pouvoirs, pour exercer une mission militaire, pour faire respecter l'ordre public, pour faire appliquer la législation royale, ou encore contrôler le bon exercice de la justice.

 

Dès le milieu du 17ème siècle, le pouvoir central a conscience que ces gouverneurs sont plus dangereux qu'efficaces. C'est une fois de plus Louis XIV qui va s'engager dans la réforme de l'administration provinciale, puisque sous son règne le nombre de gouverneurs est fixé à 40 pour l'ensemble du royaume, gouverneurs qui n'ont plus le droit de résider dans la province qu'ils sont sensés administrer. C'est un lieutenant général, avec des prérogatives exclusivement militaires, que le pouvoir royal met en place. On ne supprime pas l'institution des gouverneurs, mais on la vide de toute compétence : il est impossible d'administrer une province sans y résider. A ce titre la fonction administrative des gouverneurs n'a plus aucune réalité matérielle.

 

II. Les intendants

 

Ils vont permettre au pouvoir royal de disposer dans les provinces, à la place des gouverneurs, d'administrateurs souples, efficaces, et d'une fidélité absolue au pouvoir royal.

 

Dès le 16ème siècle, on voit apparaître des commissaires, agents administrateurs qui sont envoyés chevaucher par le roi pour seconder le gouverneur dans le domaine de la justice, dans le domaine des finances et dans le domaine de la police.

 

Lorsque ces intendants vont se stabiliser, se fixer, au détriment des gouverneurs, ils vont obtenir une compétence quasi-générale. L'intendant, dans sa province, dans sa généralité, a la possibilité de prendre des ordonnances qui s'imposent véritablement à tous, et qui ne peuvent être contestées que devant le conseil du roi. Il n'existe, face à ce pouvoir réglementaire des intendants, aucun organe provincial pouvant s'opposer. Ces intendants ont la possibilité d'entrer dans les Parlements pour assister aux sessions des cours souveraines, possibilité de contrôler l'organisation judiciaire de la province, possibilité encore, dans ce domaine judiciaire, de juger directement un certain nombre d'affaires. Tout ce qui relève de la police administrative, et de la justice administrative, tout ce qui constitue ce contentieux, est de la compétence de l'intendant. L'intendant a aussi compétence en matière de police : maintien de l'ordre dans la province, tutelle financière sur les municipalités et les communautés villageoises... Il a encore une compétence financière, fiscale : surveiller le bon fonctionnement de l'impôt (répartition, prélèvement...). Il a enfin une compétence militaire dans la gestion et l'organisation du logement des troupes.

 

L'intendant met en place un certain nombre de bureaux. Un personnel lui est ainsi entièrement soumis. il s'appuie également, pour administrer sa province, au niveau local, sur des sub-délégués. Ces sub-délégués vont constituer, sur le terrain au niveau lecal, l'oeil et l'oreille de l'intendant. Ce sont ces délégués qui vont assurer la tutelle administrative, l'efficacité de cette tutelle administrative.

 

L'intendant est un agent administratif qui est plutôt mal perçu, parce que ce sont les représentants du pouvoir royal, de ce que l'on appelle le despotisme ministériel. Pour les historiens, l'image de l'intendant est totalement différente : certes ce sont les représentants du pouvoir royal dans les provinces, certes ils disposent d'un pouvoir quasi absolu, mais en étudiant les intendances et les intendants on se rend compte que ce pouvoir quasi-absolu a toujours été utilisé dans des limites acceptables et à bon escient.

 

Leur mode de désignation, leur mode de révocation, qui imposent une responsabilité individuelle et personnelle de l'intendant vers le roi, tout cela fait de l'intendant un administrateur particulièrement efficace, et pour beaucoup l'intendant apparaît comme le précurseur de l'administration moderne, l'ancêtre du préfet, qui apparaît aux lendemains de la révolution française.

 

Ce que l'on peut remarquer, c'est la complexité du système : il existe une superposition d'échelons et de compétences, parce que l'on retrouve dans ce système administratif des formes d'organisation archaïques et des formes de très grande modernité. On remarque aussi la très grande diversité juridique, culturelle, qui existe dans le royaume. On constate aussi la très grande inégalité géographique (en fonction de la province, de l'endroit où l'on se trouve dans le royaume), sociale (en fonction de l'appartenance à un ordre privilégié ou non).

 

TITRE 2 : SOCIETE ET ECONOMIE AVANT LA REVOLUTION FRANCAISE

 

On ne peut comprendre la fin de l'Ancien Régime, la révolution française, sans s'interroger sur l'état social et sur l'organisation économique mise en place sous l'Ancien Régime.

 

Chapitre 1 : La société : ordres et classes

 

Section 1 : Les ordres privilégiés

 

On estime que la noblesse représente entre 500 et 600 mille personnes, alors que le clergé, autre ordre privilégié, est estimé à environ 150 000 clercs.

 

I. La noblesse, l'aristocratie

 

Cette noblesse, cette aristocratie, peut être définie par sa faculté, sa capacité de porter les armes et de rendre la justice. On finit par admettre que les frontières de la noblesse, de l'aristocratie, sont mouvantes et difficiles à déterminer.

 

A/ La diversité de la noblesse

 

La noblesse historique, que l'on appelle également noblesse de race ou noblesse héréditaire. Ce qui définit la noblesse, la capacité à porter les armes, est quelque chose qui est naturel, et comme tout ce qui est naturel, cela se transmet par le sang.

 

On retrouve également, en deuxième composante de la noblesse, ceux que l'on appelle les anoblis : il est possible d'acquérir la noblesse sans recevoir celle-ci de façon héréditaire, grâce à ce que l'on appelle les lettres d'anoblissement. Ces lettres d'anoblissement sont accordées par le roi à titre de récompense aux personnes qui ont rendu service au souverain. Ces lettres d'anoblissement ne sont jamais gratuites, et cela devient un moyen pour le pouvoir royal de faire rentrer se façon régulière de l'argent dans les caisses du royaume. A côté de ces lettres d'anoblissement, un autre moyen d'être anobli est l'exercice de certaines fonctions. C'est le cas notamment de certaines fonctions judiciaires, qui permettent d'acquérir ce que l'on appelle la noblesse de robe. C'est aussi le cas de certaines fonctions administratives : certaines fonctions municipales, notamment dans certaines grandes villes, permettent d'acquérir ce que l'on appelle la noblesse de cloche (symbole de l'émancipation urbaine). La noblesse peut encore s'acquérir avec des fonctions et des charges militaires. Certaines de ces fonctions permettent d'acquérir immédiatement la noblesse. pour d'autres il faut parfois attendre deux ou trois générations. Sous l'Ancien Régime il existe une véritable chasse à la fausse noblesse : l'administration royale s'engage à contrôler la réalité de la noblesse.

 

Si la noblesse peut s'acquérir, elle peut également se perdre. Elle se perd notamment en cas de condamnations infamantes. Elle peut se perdre encore par ce que l'on appelle la dérogence : déroger consiste pour le noble à utiliser un certain nombre de pratiques ignobles (sont considérées comme des pratiques ignobles les fonctions mercantiles, à l'exception de la métallurgie et de la verrerie, de l'exploitation des mines, du commerce en gros et notamment du commerce colonial. Cette perte de la noblesse par l'exercice de pratiques ignobles est provisoire : dès que le noble cesse de déroger il retrouve sa qualité.

 

B/ L'inégalité des richesses

 

Toute la noblesse dispose de privilèges, mais ces privilèges n'entraînent pas forcément pour leur bénéficiaire richesse et fortune. Ces privilèges sont pour beaucoup des privilèges honorifiques : la faculté de porter l'épée, une place privilégiée à l'Eglise, la capacité d'avoir des chiens... Ces privilèges sont également judiciaires : cette noblesse dispose de la capacité d'être jugée par le baillis. Lorsque les affaires sont criminelles, c'est directement le Parlement, la cour souveraine, qui va juger le noble. Il s'agit également pour cette noblesse de ne pas être fouettée, de ne pas être pendu, de ne pas être décapité. Les titres de noblesses donnaient aussi des privilèges fiscaux : les nobles ne payent pas la taille et ne sont pas soumis aux corvées.

 

Ils bénéficient d'autres privilèges, comme les banalités et les monopoles économiques. ces nobles vont disposer également comme sources de revenus des offices, et des pensions allouées par le roi. Ils disposent également du produit des activités économiques et industrielles qui ne dérogent pas. On peut donc dire que la noblesse dispose de privilèges fixes, dont les revenus vont varier en fonction de l'importance des domaines par exemple, ou encore de la nature des offices, ce qui explique que dans cet ordre qu'est la noblesse on va voir de grandes fortunes, d'immenses fortunes, qui vont cotoyer de très grandes pauvres populations.

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