Histoire des institutions 6/03/08
On retrouve la noblesse de Cour à Versailles, dans l'entourage du roi. Pour appartenir à cette noblesse de cour il faut des critères de sang, il faut appartenir à la grande noblesse, et également des critères d'ancienneté. Exemple de ces exigences : un règlement de 1760 exige pour cette noblesse de cour une ancienneté qui remonte jusqu'à 1400, ce qui représente un certain nombre de générations. Cette noblesse vit des gratifications accordées par le roi, qui viennent s'ajouter à des revenus fonciers déjà très importants, puisque cette grande noblesse est à la tête de très grands domaines. Cela n'empêche qu'il existe également à la cour une noblesse liée aux fonctions occupées, ce que l'on appelle des charges domestiques qui sont à la fois honorifiques et à la fois un moyen de toucher des revenus importants de la part du roi. Cette noblesse de cour est véritablement la plus riche et la plus puissante du royaume.
A côté de cette noblesse de cour on va retrouver la noblesse de province, majoritaire, qui n'est pas présentée au roi et ne bénéficie pas de ses largesses, de ses gratifications, et pour cette noblesse de province, plus que le titre, ce sont les ressources qui vont discriminer. Ces ressources sont constituées de la fortune terrienne, de la justice et du revenu de cette justice. En fonction de ces revenus on va retrouver la moyenne noblesse, cele qui arrive finalement à retenir son rang, et également la petite noblesse. Cette petite noblesse est majoritaire, les revenus du domaine sont à peine suffisants pour assurer les revenus vitaux, ce qui explique que cette petite noblesse va être rétrograde, attachée aux privilèges féodaux et aux privilèges seigneuriaux (tout simplement parce que ces privilèges sont la seule possibilité pour elle de trouver ses revenus). Une autre composante de cette noblesse de province est la noblesse de robe, celle qui va exercer les fonctions judiciaires, dont les charges sont anoblissantes. Cette noblesse de robe est une noblesse jeune, issue de la bourgeoisie, une noblesse acquise, qui va être attachée à ses privilèges car elle a eu beaucoup de mal à les acquérir, mais cette noblesse de robe est très souvent d'un niveau de fortune satisfaisant (en raison des origines bourgeoises et des revenus des charges qu'elle occupe).
La diversité de la noblesse est à l'origine d'un phénomène au 18ème siècle, un phénomène que l'on retient sous le nom de réaction nobilière.
C/ La réaction nobilière
La noblesse va avoir tendance à se refermer, c'est à dire qu'elle va limiter les possibilités d'entrer dans cet ordre aux nouveaux venus. Il s'agit donc d'un phénomène de fermement, on ne peut plus entrer dans la noblesse, les exigences de justification de nombreux actes de noblesses étant de plus en plus fortes. Ce phénomène de fermeture s'accompagne également de la défense systématique des privilèges : les nobles vont rechercher de vieux droits, d'anciens droits, qui existaient pendant la période féodale, afin de les exiger à nouveau. Cette recherche d'anciens droits, destinés à améliorer les revenus de la noblesse, passe par les registres juridiques, qui portent le nom de terriers. Ces terriers sont des repères de textes qui rassemblent les lois et usages d'une seigneurie. Il y a donc renaissance de nouveaux droits que l'on exige de la population, mais également ré-examen des limites entre terres seigneuriales et terres roturières : on ré-examine la répartission des terres, toujours dans l'optique d'obtenir des revenus supplémentaires.
Ce phénomène touche essentiellement la petite noblesse de province : tout est bon pour obtenir de nouveaux revenus. Cette réaction seigneuriale est pour beaucoup dans la dégradation des relations entre noblesse et paysans.
II. Le clergé
Le clergé se démarque par son importance sociale. La religion catholique est religion d'Etat sous l'ancien régime, et le clergé dispose d'une influence considérable sur les populations du royaume.
A/ La place du clergé dans la nation
Le clergé, c'est d'abord le clergé séculier, c'est à dire ces clercs qui vont vivre dans le siècle, au contact direct des populations. Ce sont les évêques, au sommet de la hiérarchie, ce sont également les curés dans les paroisses. Ce clergé séculier a une fonction publique, un rôle public puisque c'est lui qui va tenir les registres d'état civil (naissance décès ou mariages), rôle public aussi à travers les missions d'enseignement et les missions d'assistance, les missions de santé, de solidarité.
On trouve aussi le clergé régulier qui rassemble tous ceux qui se reconnaissent dans une règle monastique, dans un ordre monastique. Pour le 18ème siècle, ce clergé régulier est en perte de vitesse. Ce clergé est un ordre privilégié. Comme la noblesse, le clergé dispose donc de privilèges, de juridiction et de droit : il existe des tribunaux religieux qui vont juger les clercs, ces tribunaux s'appellent les officialités, et ce droit propre au clergé est le droit canonique. Le clergé bénéficie également de privilèges fiscaux. La possibilité pour les impôts royaux de bénéficier de ce que l'on appelle le don gratuit, qui est la possibilité pour le clergé de racheter sous forme d'abonnement les impôts royaux, sur une longue période (de cinq ans généralement). C'est une forme de somme forfaitaire déterminée au début de la période et qui représente pour cet ordre un montant d'impôt très inférieur à la somme normalement due. Autre privilège accordé aux clercs : la dispense du service militaire. On retrouve enfin un certain nombre de privilèges honorifiques, qui ont moins d'intérêt ici.
B/ Les inégalités de la société cléricale
Le clergé, en tant qu'ordre social, est un ordre particulièrement riche, une richesse qui repose tout d'abord sur la propriété foncière, dans les campagnes grâce aux ordres monastiques, au clergé régulier, propriété immobilière également dans les villes. on estime que le clergé est propriétaire de 10% de la propriété foncière totale du royaume, ce qui est absolument considérable (le clergé ne représente que 150000 individus). Cette propriété foncière engendre le plus souvent des droits domaniaux, des droits seigneuriaux. Autre source de richesse et de revenus pour le clergé, traduction de privilèges sociaux, le clergé a la possibilité de prélever un impôt clérical : cet impôt prélevé sur les fidèles et la dîme. Cette dîme est un impôt prélevé sur tous les produits des champs. Il représente un dixième de chacune des productions, de chacune des récoltes. Cette dîme représente tous les ans entre 100 et 120 millions de livres. Ce clergé en tant qu'ordre est véritablement le plus riche de la nation française.
Il n'empêche qu'on va trouver dans le clergé différentes réalités sociales. Au sommet de ce clergé on retrouve ce que l'on appelle le haut clergé : ce sont les évêques, les abbés des monastères. Ces personnages souvent appartiennent à la noblesse (ils en sont issus). On estime ce haut clergé à environ 50000 personnes. Ces membres du haut clergé disposent de revenus très importants, qui peuvent être jusqu'à 130 fois supérieurs aux revenus d'un simple curé de campagne.
Ces revenus sont issus de bénéfices, qui sont attachés à une charge religieuse. Ces bénéfices constituent les moyens d'existence pour celui qui les détient. C'est le roi de France qui gère cette feuille des bénéfices (tradition gallicane oblige), et on a tendance à considérer sur le long terme que ces bénéfices, pour le clergé, ont un caractère quasi héréditaire, quasi patrimonial. Ce haut clergé mène un train de vie fastueux, qui est très mal perçu par les populations, et qui porte une forme de discrédit sur les institutions cléricales.
Après le haut clergé on trouve le bas clergé. Il est constitué essentiellement par les curés de campagne, qui sont très majoritaires au sein de cet ordre. Le bas clergé va partager les conditions de vie, souvent très difficiles, du tiers état. C'est cette proximité qui explique que ce bas clergé est sensible aux revendications politiques qui émergent en 1789 du tiers état au moment des Etats généraux. On est dans des conditions sociales ici très proches de la misère.
Section 2 : Le tiers état
Le tiers état n'est pas un ordre privilégié, mais cela ne veut pas dire qu'à l'intérieur du tiers état certains individus ne bénéficient pas de privilèges : les habitants des villes par exemple disposent d'un certain nombre de privilèges. Il existe deux grandes divisions dans ce tiers état : l'ordre n'est pas homogène. On va retrouver d'abord la bourgeoisie, et ensuite le peuple, les classes populaires.
I. La bourgeoisie
Initialement, les bourgeois sont les habitants des bourgs. Par extension, les bourgeois sont ceux qui habitent en ville, ce sont des citadins, mais des citadins qui ont atteint un certain niveau de vie, une certaine richesse personnelle.
A/ La petite et la moyenne bourgeoisie
Cette petite et moyenne bourgeoisie est constituée d'abord par la bourgeoisie rentière, qui va vivre des revenus des immeubles qu'elle possède, et des emprunts qu'elle concède. On retrouve également la bourgeoisie de fonction, c'est à dire tous ceux qui vont exercer des charges publiques de second ordre, ceux qui vont être à la tête de petits offices, de petits fonctionnaires (greffiers, huissiers, petits juges).
Une autre composante de cette bourgeoisie est celle des professions libérales : les médecins, les notaires, les avocats, appartiennent à cette bourgeoisie des professions libérales.
La dernière composante est celle que l'on appelle la bourgeoisie artisanale, qui est composée de certains maîtres de corporations : c'est une bouregoisie économique dont il est question.
Au sein de cette petite et moyenne bourgeoisie, on trouve une très grande insatisfaction sociale : cette petite et moyenne bourgeoisie est victime du phénomène constant du 18ème siècle de l'augmentation des prix. Cette petite et moyenne bourgeoisie est donc, en 1789, un des soutiens politiques les plus actifs au phénomène révolutionnaire.
B/ La grande bourgeoisie d'affaires
Cette grande bourgeoisie d'affaires domine par son rôle et sa fortune. On retrouve au sein de cette bourgeoisie la bourgeoisie de finances, qui est une bourgeoisie liée à l'Etat par ce que l'on appelle le capitalisme de cour. C'est parmi cette bourgeoisie de finance que l'on va retrouver par exemple les fermiers généraux du royaume. Par ses capacités financières cette bourgeoisie est presque élevée au rang de la haute noblesse.
Une autre composante de cette bourgeoisie d'affaire est la bourgeoisie de banque. C'est une bourgeoisie qui va financer l'industrie, et qui va donc jouer un rôle essentiel pour le développement économique du royaume.
La dernière composante de cette bourgeoisie d'affaires est la bourgeoisie du négoce et du secteur industriel. C'est au sein de cette bourgeoisie que l'on retrouve les fortunes les plus importantes.