Institutions administratives 21/01/08
- selon Georges Vedel : « L’administration est l’ensemble des activités qui, sous l’autorité des organes de décision publics, tendent à maintenir l’ordre en société et à répondre aux besoin d’intérêt général ».
Il convient d’examiner successivement tous les aspects du concept d’administration en répondant aux quatre grandes questions suivantes :
- Qu’est-ce qu’administrer (chapitre 1) ?
- Qui administre (chapitre 2) ?
- Comment administrer (chapitre 3) ?
- Où administrer (chapitre 4) ?
Chapitre 1 : Qu’est-ce qu’administrer ?
L’administration est perçu à travers un champ vaste d’activités, qui portent le nom de Service public, du plus petit, comme une patinoire de ville ou un gymnase, jusqu’au plus grand, comme la justice, la défense ou l’ANPE. Ces services publics sont créés par les autorités publiques constitutionnellement et légalement établis : gouvernement, parlement, Exécutifs territoriaux, assemblées territoriales.
Ces services publics :
- ou bien, prescrivent c’est à dire autorisent, empêchent, interdisent les activités des individus, et il s’agit de services publics exerçant une fonction de réglementation, de prescription.
- ou bien, répondent à des besoins collectifs, en fournissant des biens ou des services, soit par eux-mêmes soit en recourant à des opérateurs privés, et il s’agit de services publics exerçant une activité de prestation.
L’approche matérielle de la définition du concept d’administration conduit à distinguer deux aspects :
- La production de normes (activité de prescription) réglant la vie collective et, de ce point de vue, administrer c’est rendre possible la vie en société ; c’est assurer à chaque citoyen une sphère d’autonomie, de libertés, dans les limites du célèbre adage : « la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres ». C’est, par exemple, fixer des limitations aux heures d’ouverture des discothèques, déterminer le taux d’alcoolémie à ne pas dépasser en conduisant, limiter la vitesse sur route ou en agglomération, fixer un sens unique à la circulation, déterminer les dates limites de la consommation alimentaire, fixer les dates des soldes, délivrer des permis de construire, confectionner des plans d’intervention en cas de sinistre, plans de navigation…
- La fourniture de biens et de services, e de ce point de vue administrer c’est apporter aux citoyens des biens et des services comme ceux, de la distribution de l’eau, de l’assainissement, de la distribution du courrier, de la construction et de l’entretien de routes, de l’organisation des transports. C’est aussi le versement d’allocations, le RMI par exemple, la construction d’écoles, de collèges, de prisons, de préfectures, la fourniture, à travers un établissement public de coopération intercommunale, d’instrument de musique.
L’Etat, et toutes les autres collectivités publiques et leurs groupements, sont en charge de la création et du fonctionnement de ces services publics.
Le professeur Charles Eisenmann résume ainsi le double aspect de la dimension matérielle du concept d’administration : « l’Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics apparaissent tantôt comme créateurs de droit, d’un ordre juridique, tantôt comme fournisseurs de biens et de services. Régir la vie sociale et assurer la réalisation de l’ordre qu’ils ont voulu d’une part, assurer des prestations d’autre part, telle est la double fin des activités administratives de l’Etat, des collectivités et de leurs établissements publics ».
Section 1 : Les tâches de prescription de l’administration
L’activité de production de norme (date d’ouverture de la chasse au gibier d’eau par exemple) et de contrôle de leur application est une activité dite de police administrative.
Dans son ouvrage « théorie générale de l’Etat », Léon Duguit : « c’est la loi qui limite la liberté individuelle, qui la limite dans la mesure où cela est nécessaire pour protéger la liberté de tous. La loi donne à l’autorité publique des pouvoirs particuliers qui s’appellent des pouvoirs de police administrative, en vertu desquels elle peut d’avance prendre certaines mesures pour empêcher que tel acte ou tel fait contraire au droit ne se produise ».
Lorsque le fait ou l’acte contraire au droit est commis, accompli, l’autorité publique qui intervient n’est plus l’autorité administrative mais l’autorité judiciaire ; la police exercée n’est plus préventive mais répressive, qui n’est plus placée sous la direction du ministre de l’intérieur mais du ministre de la justice.
On distingue deux sortes de polices administratives : la police administrative générale et les polices administratives spéciales.
I. La police administrative générale
La police administrative générale a pour but le maintien de l’ordre public. La notion d’ordre public est une des pierres angulaires du droit administratif. Après l’étude de son contenu, il faut définir les autorités spécialement habilitées par la loi à prendre des mesures de police administrative générale.
A/ La notion d’ordre public
Il convient de la décrire dans un sens strict et dans un sens extensif.
1) Au sens strict
La loi de 1884 sur l’organisation municipale définit l’ordre public : la sécurité, la sûreté, la tranquillité, la salubrité.
L’édiction de normes en vue de prévenir les troubles à la sécurité consistent en, par exemple, la fixation du sens de la circulation routière, l’interdiction de baignade, le balisage de pistes, la protection contre les incendies : l’autorité administrative édictera des normes obligatoires pour tous les concepteurs d’immeubles pour prévenir, en cas de sinistre, les dommages aux personnes et aux biens.
L’édiction de normes en vue de la sûreté consiste en, par exemple, des mesures de prévention des atteintes aux personnes ou de la dégradation des biens : lutte anti-tag, cheminement interdit à partir d’une certaine heure du soir…
L’édiction de normes de prévention des troubles à la tranquillité publique : de la limitation des heures d’ouverture de lieux publics jusqu’à l’obligation faite aux fabriques industrielles de se munir de systèmes anti-décibels.
L’édiction de normes de salubrité : toutes questions d’hygiène : évacuation des eaux usées par exemple, conditions d’ouvertures de décharges (ou de fermetures), traitement des déchets, etc.
2) Au sens extensif
La jurisprudence a étendu les quatre composantes, en fonction de l’état des mœurs et de leur évolution. La notion d’ordre public recouvre aussi d’autres exigences : l’atteinte aux mœurs, la préservation du cadre de vie, l’esthétique, etc. entrent désormais dans la notion d’ordre public.
Un candidat à l’obtention du permis de construire pourra satisfaire à toutes les composantes classiques de la notion d’ordre public sans pour autant obtenir l’autorisation sollicitée s’il ne répond pas à une dimension nouvelle que revêt la notion d’ordre public, celle de l’harmonie, en volume et en couleur, avec l’environnement. « L’ordre public est la paix interne qui permet à un groupe humain d’être vraiment une société, d’après Dupuis. L’avènement de la norme met fin à l’état de nature, il permet à chacun d’exercer ses droits dans le respect de ceux d’autrui. L’ordre public est la condition nécessaire à la poursuite des objectifs des Etats civilisés, c’est à dire la recherche de la prospérité et du bien être du plus grand nombre.
B/ Les autorités administratives
Les autorités administratives sont habilitées à édicter des normes de police administrative.
S’agissant de l’Etat, c’est naturellement l’autorité que la constitution désigne comme leur chef de l’administration : c’est le premier ministre. Ses représentants locaux, les préfets, sont habilités eux aussi à prendre des mesures de police administrative.
S’agissant des collectivités territoriales, le maire détient dans sa commune d’importants pouvoirs de police administrative, ceux-là même que justement la loi du 1884 sur l’organisation communale lui a donnés, et qui ont servi par la suite à définir la notion d’ordre public.
Les exécutifs des départements et des régions ont aussi un pouvoir de police administrative mais beaucoup plus restreint, dans les immeubles qui sont leur propriété, ou sur les routes (s’agissant des départementales).
II. La police administrative spéciale
Est spéciale une police dont l’autorité d’exercice n’est pas celle qui devrait normalement l’être. C’est le cas de la police des gares et des aéroports, qui devraient normalement être exercés par les maires des communes, sièges de ces gares ou aéroports